Eliquide Bio, ce qu'il faut savoir

Par Le petit fumeur - 05/10/2016
 

Temps de lecture : 7 minutes

Le « Bio » est un concept complexe, porteur de sens et d'implications aux dimensions variables selon la position de l'observateur vis-à-vis de l'ensemble de la chaîne de production. Pour le consommateur, il est en règle générale synonyme de santé (limiter la présence de produits potentiellement nocifs dans les processus de production et de transformation) et de faible impact écologique (pratiques agricoles durables). En une phrase : la production et la transformation d'un produit bio se fait dans des conditions soucieuses de la santé et de l'environnement. Des labels assurent la cohérence et la continuité de ce concept. Soit des organisation tierces dont le rôle est de contrôler le respect des normes « agriculture biologique ». Et ce à toutes les étapes qui séparent la production initiale du consommateur.  

Le bio & le marché

Si cette vision est exagérément simpliste, elle a toutefois le mérite de mettre en évidence le raccourci logique exploité lorsque le bio se voit observer dans un contexte parallèle à celui de la production, on parle bien sûr ici de consommation. Il ne suffit pas de proposer des produits de qualité supérieure pour exister sur un marché. Il faut avant tout être capable de les vendre. Or, s'il existe bien une continuité dans le bio, cette dernière demeure néanmoins fragmentée dans le temps (évolution des normes), dans l'espace (normes différentes Europe / USA / Japon). Et la pluralité des acteurs ainsi que des labels contribue fortement à rendre l'ensemble peu intelligible pour le consommateur. Il suffit de consulter les textes relatifs à l'agriculture biologique en Union Européenne pour prendre la mesure de la complexité du dispositif. Tout en sachant que ces normes sont 1. critiquées par certains labels pour leur manque de sévérité, 2. sujettes à une évolution (avec de nombreuses implications en termes de tolérance pour l'écoulement des stocks a posteriori), 3. pas valables partout dans le monde. Dans ce contexte, il est bien difficile de transposer les vertus du bio (qui sont bien réelles) à un discours marketing. Pour diffuser le bio, il faut le vendre, et pour le vendre il faut des arguments simples et limpides.   Face à cette problématique, l'argumentaire marketing a sa solution (assez géniale d'un point de vue rhétorique). Celle-ci consiste à exploiter ce flou généralisé lui-même pour faire la promotion du bio. Ainsi l'argument initial « Un produit bio a été produit/transformé dans des conditions soucieuses de la santé et l'environnement » se voit simplifier à travers le prisme du discours marketing jusqu'à devenir « C'est bio, donc c'est mieux ». Ce raccourci fonctionne en faisant l'impasse sur ce qui est réellement important - à savoir le contenu concret des normes qui constituent le bio – et se recentre sur l’appellation bio comme une preuve de qualité se justifiant elle-même. Autrement dit, au lieu de promouvoir l'impact réel d'une production biologique soit : «Le produit se conforme à telles et telles normes, donc il mérite le label biologique », le discours marketing généralement rencontré se limite à nous dire « C'est parce que ce produit a le label bio qu'il est meilleur pour vous et l'environnement ». En littérature on appellerait ça une synecdoque : la partie (la certification) se substitue au tout (ce que la certification traduit).   Cette approche a le mérite de fonctionner admirablement, comme en témoigne l'essor du marché du bio (+14,7 % de croissance entre 2014 et 2015). Toutefois il s'agit d'une stratégie à double tranchant. Ainsi en justifiant le bio par le bio dans une sphère marketing, on finit par lui donner la propriété d'un gaz. A savoir celle d'occuper tout l'espace dans un volume donné. Lorsque la fonction commerciale prend le dessus sur la démarche initiale, il n'est plus forcément question pour les revendeurs de proposer une offre en adéquation avec les principes du bio. Mais plutôt de l'utiliser comme tremplin vers d'autres parts de marché, sans se préoccuper outre mesure de la pertinence réelle du bio pour un secteur donné.  

Eliquides bio ?

Flacon eliquide bio   L'exemple de la cigarette électronique est extrêmement significatif. Depuis 2014 de nombreux fabricants d'e-liquides ont mis sur le marché des gammes de liquides ecigarette présentés comme biologiques. Certains fabricants et revendeurs ont même complètement vu le jour pour mener à bien des projets articulés autour de ce concept. Sur le papier, il s'agit d'une intention d'autant plus louable que la cigarette electronique touche également à la notion de santé. Néanmoins, l'appellation e-liquide bio est d'emblée problématique en soi. Il n'existe à ce jour, aucune certification biologique spécifique aux eliquides. Rappelons-le, l'appellation “bio” est un label qui s'obtient en respectant des normes. Or les normes supposées définir ce qu'est un eliquide biologique n'existent tout simplement pas. Ces cas (extrêmes certes) illustrent parfaitement l'idée que le bio en tant qu'outil marketing peut être complètement à coté de la plaque lorsqu'on tente de le mettre en perspective avec sa démarche initiale.  

Eliquides partiellement bio

Si un e-liquide ne peut pas (encore) être complètement bio, le bio n'est cependant pas totalement pas incompatible avec le marché de la cigarette électronique. C'est ce que comprennent progressivement les fabricants historiques comme Alfaliquid et Liquideo. Un eliquide en tant que produit fini ne peut pas recevoir de certification biologique, certains de ses composants en revanche le peuvent. Pour rappel, un e liquide à vapoter se compose d'une base mêlant glycérine végétale et (très souvent) propylène glycol. À cette base peuvent être ajoutés des arômes de synthèse ou naturels, de la nicotine et des additifs comme de l'alcool. La glycérine, les arômes naturels et certains additifs peuvent être issus de l'agriculture biologique. Ils peuvent donc profiter de la certification bio. Toutefois, il est nécessaire de mettre cette notion en perspective avec le fonctionnement même de la cigarette électronique. Le cas de la glycérine est particulièrement frappant. La présence de cette dernière dans un eliquide est loin d’être anodine. Ses propriétés chimiques permettent en effet la vaporisation sans causer d’impact sur la santé. Dans ces circonstances, on réalise facilement que la pureté du produit est fondamentalement plus importante que ses origines. Une molécule de glycérine pure aura exactement la même formule, les mêmes propriétés et le même impact, peu importe son mode de fabrication, végétale, bio, voire pourquoi pas synthétique (les coûts de production rendent ici la synthèse inutile.)   [caption id="attachment_39" align="aligncenter" width="1024"]D’un point de vue chimique, la glycérine végétale pure est en tout point identique à son homologue bio D’un point de vue chimique, la glycérine végétale pure est en tout point identique à son homologue bio[/caption]     Il en va de même pour l’ensemble des autres produits éligibles pour une certification bio dans la composition d’un liquide de vapotage. En matière de santé, la pureté du produit est infiniment plus importante que son origine. De l’alcool de betterave pur à 100% c’est exactement la même chose que de l’alcool de canne à sucre pur à 100%, à savoir de l’éthanol. Pour obtenir les propriétés escomptées sans mauvaises surprises, on privilégie la pureté sur l’origine. Là est toute la différence.

 

Du coup le bio dans les e-liquides c’est du vent ?

La réponse est simple : c’est non. Certes, il est évident que l’appellation biologique d’un liquide en tant que produit fini est simplement trompeuse en 2016. Non, un efluide dont certains composants sont effectivement biologiques n’est pas plus neutre sanitairement qu’un e liquide pour cigarette electronique de qualité. Il reste toutefois la dimension environnementale. Lorsque vous vapotez un eliquide composé en partie de produits bio, ce n’est pas meilleur pour votre santé que n’importe quel liquide prêt à vaper de confiance. Toutefois vous contribuez modestement à soutenir des initiatives de productions qui se veulent plus soucieuses de l’environnement. Et ça, c’est déjà quelque chose.

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